L'organisation chaque nuit nouvelle, jamais acquise, commence à m'imprégner.
Mais... pourquoi tant de saveurs ici et pas ailleurs, me direz vous...
Jmen vas vous dire la réponse (je commence à parler québécois...)
Ici, les pâtes ne sont pas pétries. Fichtre donc, pour une boulangère, en voilà une affirmation étrange !
Non, les pâtes sont frasées (c'est à dire simplement mélangées pour que la farine et l'eau fasse un truc pâteux) quelques minutes, entre 4 et 7. Avec minimum 80% d'hydratation, vous pouvez bien imaginer que ça donne quelque chose de très liquide, sans corps, sans tenue "mais comment kjvais faire pour façonner cte bouillie informe et en sortir un pain ??!!!".
Oui mais... je ne vais pas vous l'apprendre, qu'est-ce que c'est donc qui remplace le manque de pétrissage ?? Bin c'est le POINTAGE évidemment ! Le premier repos, dans le pétrin !!
Donc nos pâtes, celles du moins qui n'ont pas de levain, elles reposent dans la cuve du pétrin longtemps. Hyper longtemps. 8-9-10h...
Ah mais oui mais une pâte qui repose autant après ça gonfle informément et ça n'a pas non plus de tenue ça dégobille...
Non ! Pas si on rabat les pâtes, vous devez bien le savoir, comme on la rabattait 3 fois au Grenier à Pain. Oui, sauf qu'un rabat par heure sur 9h, ça impliquerait de ne vraiment jamais dormir...
DONC, nous on a un truc éléctrique, un disjoncteur qui remet du courant 6sc par heure, et ça fait un rabat automatique sur la cuve du pétrin. Ouais, c'est dingue. Je n'ai pas réussi à comprendre, mais Benoit m'a justement dit d'arrêter de vouloir tout comprendre, ça pour le coup, c'est le job de l'éléctricien.
Ok.
DONC. Vlà que la pâte repose un siècle. Et ça lui donne du corps. On revient à la fin du siècle en question, à 2h du matin, ou 3h les jours de grasse matinée, et là, youhou, la pâte a un tout joli réseau glutineux.
Là on réalise que quand même, quand même, il y a quelque chose de magique dans la farine, dans la levure, dans le festin que se fait la levure de tous les pitis glucoses...
Bon, ok, on a compris prof, mais qu'est-ce qui ôte le goût du pain aujourd'hui ?
Beaucoup de choses.
Mais si on démarre à l'étape 2 (après l'étape 1 que sont les matières premières), on a notamment l'oxydation, qu'apporte un long pétrissage (et qui blanchit la pâte qui était d'une jolie couleur crème, et qui fait que se forme le fameux gaz Hexanal responsable de l'insipidité oui oui).
Evidemment, en moindre mesure, car il est tout de même possible de faire un pain très goûteux avec un pétrissage un poil plus long que celui de Benoit (mais pas tant), moins d'hydratation, mais là je vous parle de la signature farinoman.
Donc avec un mini pétrissage, ET un repos long comme ça, on ne PEUT PAS faire un pain pas bon. Bin oui, c'est pas plus compliqué que ça !
Voilà, la prochaine leçon de boulangerie sera sur... autre chose sans doute.