mardi 24 mars 2009

Help me to understand

Il y a ceux qui se dirigent vers une quelconque fac de socio ou d'éco après le bac. Ceux qui font des écoles de glandus où ils apprennent de vagues théories de marketing qui leur font croire qu'ils sont les futurs maîtres d'un monde catégorisé en colonnes de tableaux Excel.
Il y a eux, donc.
Eux, avec leur air pédant et hautain, ils vont quand même avoir un salaire plutôt correct à la fin de leurs études (de glandus) avec une progression annuelle souvent intéressante.

Alors pourquoi est-ce que moi, je suis masochiste ?

Pourquoi moi, après le bac, j'ai choisi de faire un truc immonde, spécialité française (j'ai nommé la classe prépa) dans lequel pendant 2 ans j'ai eu des 1, des 2 et des 3 sur 20 (dois-je compter mon historique -167 en anglais ? j'essaye de l'effacer de ma mémoire, il y reste, inexorablement), pendant 2 ans, on m'a dit que je n'étais peut-être pas à ma place, on m'a rendu des bulletins où j'étais reléguée au dernier rang de la classe (il m'est cependant arrivé une fois d'être classée avant-dernière), on m'a fait croire que j'étais une grosse merde.

Oui, j'ai écrit "grosse merde". Normalement, ça se dit, ça ne s'écrit pas.

Mais après ces 2 ans, on aurait pu se dire que c'était fini après tout, la perpétuelle dévalorisation, l'écrabouillement permanent. Bin non.
J'ai recommencé. A croire que j'aime penser que je suis une grosse merde.

Oui, je l'ai écrit. Normalement ça se dit, ça ne s'écrit pas.

Il doit y avoir écrit sur mon front "allez y, il faut surtout que je continue à penser que je suis une g--ss- m-r-d-. Insultez-moi 6h de suite, j'adore les samedis comme ça"

Je crois que je suis masochiste.

L'impression difficile et blessante que je ne serai jamais à la hauteur.

lundi 16 mars 2009

Souvenir de Tokyo



Je ne savais pas comment tomber au judo
(il y a un art de la chute)
Derek, ceinture noire, était censé m'apprendre à tomber.
J'ai eu mal. Très.

La langue de Barbarie


Babakar nous emmène donc jusqu’à une petite plage d’où nous montons en pirogue jusqu’à la langue de Barbarie. Une île, mais aussi un parc naturel, plein d’oiseaux.

J’ai l’impression de rêver.

Cette île est éphémère : pour soit-disant lutter contre les risques d'inondation à Saint-Louis, une brèche de 4 mètres a été ouverte le 3 octobre 2003 en plein milieu de la Langue de Barbarie. Cette brèche s'est élargie de 200 mètres en trois jours seulement ! Six mois plus tard, c'est un trou béant de 800 mètres qui laissait passer les eaux du Sénégal devenant de fait la nouvelle embouchure du fleuve...

Je m'assois tout au bout de la langue de Barbarie. Je suis pieds nus dans le sable. Tout le monde est parti se balader, je reste à écouter la mer.

Expérience de liberté.

samedi 7 mars 2009

St Louis, donc


J'arrive enfin sur l'île.
En face de moi, le syndicat d'initiative. "Bonjour, je cherche à dormir pour pas cher. Et aussi, je cherche une excursion pour demain, au parc de la langue de Barbarie ou au Djoudj" "ah oui mais pour les excursions, on les fait si on a suffisamment de monde, si vous êtes seule, vous allez payer trop cher, revenez à 18h" (il est 11h).

Je pars dans les rues, me trouver un auberge.

"Salut, ça va ?"
Un gars derrière moi.
Je suis un peu méfiante. Une touriste seule...
Bin oui ça va. "t'es là depuis longtemps ? tu restes combien de temps ? T'aimes le Sénégal"
Je réponds, rapidement mais je réponds. J'arrive vaguement à m'en débarasser au moment où je lui dis que je vais voir mon auberge, que je sais où elle se situe, que je n'ai besoin de personne. Et là il me dit qu'il est sculpteur, que sa boutique et juste là et que... bon ok, j'enregistre, je repasserai - peut-être. Il me lâche.

Premier exemple. TOUS les Sénégalais sont comme ça. Au bout d'un moment c'est très lourd.

Je marche. 2 mètres plus loin, ça recommence, avec un autre.
"Salut, ça va ?"
Mais lâchez moi... jsuis crevée, je cherche une auberge pour poser mes affaires et aller déjeuner tranquillou.
"Nan mais si tu vas dans cette auberge, c'est pas top, tu vas être dans un dortoir, alors que moi je connais un lieu où t'auras une chambre seule..."
J'en ai marre, j'accepte, je le suis.
J'arrive dans une petite cour, il n'y a même pas écrit que c'est un hôtel. Je suis sceptique, il s'en rend compte. "Regarde, il y a d'autres touristes, ils sont contents". Bon, c'est vrai. Et puis j'ai une chambre seule avec "salle de bain" (très sommaire). Et puis c'est 10000francs cfa avec petit déj (=15 euros, plus tard, j'ai appris à avoir des chambres encore plus luxueuses à 5000 francs. Mais c'est le premier jour...). Allez, j'accepte.
Il continue à me parler, là je lui dis "tu peux me laisser seule maintenant s'il te plait ?". Il s'en va.

En fait les Sénégalais sont lourds, mais vraiment pas méchants. Quand on leur fait comprendre, ils s'en vont. Ils sont gentils, ils cherchent juste à gagner un peu de sous.


Et je pars me trouver un resto, et visiter mon île.
C'est chouette. Il fait beau, je suis tranquille.
Je m'asseois sur un banc face à la mer, devant les pêcheurs. Je fais une micro sieste. Jsuis bien.
Je sors mon journal, ma trousse.
Malheur.

Des jeunes filles : "donne nous tes stylos, donne des stylos"
Bon, je suis Française, j'ai plein de stylos. Allez, j'en lâche un. "moi aussi moi aussi". J'en offre un deuxième. "Et moi, et moi". Euh non, là les mignonnes, mes stylos plumes, je les garde. "Allez allez". Bin non, je veux écrire mon journal !
"Je te hais"
Ah bin là ma chérie, tu peux être sûre que je ne vais rien te donner.

J'écris.

Pleins de jeunes filles m'entourent. En fait, je suis devant l'école privée de l'île, elles ont bientôt cours. Au début, j'ai l'impression qu'elles se moquent de moi. Et puis on papote. Une heure.
"Toi tu es une blanche gentille, les autres sont pas sympas. Ils viennent juste sur la plage pour bronzer et ils ne nous parlent pas".

...

La vie, c'est tout d'abord des rencontres.

...

Je termine mon tour de l'île. Je suis devant le syndicat d'initiative. J'y retourne. "Non, il n'y a toujours personne pour les excursions, je vous avais dit demain". J'y croise un touriste solitaire, je lui propose une excursion. Il a l'air méfiant, à croire que je vais le violer (j'ai bien le physique pour).

Des jeunes m'accostent pour me faire faire le tour de l'île en calèche. 8000 francs.
10mn plus tard, je suis sur une calèche, pour 3000 francs.

A 18h évidemment, toujours personne pour mon excursion.
"Non mais faites quelque chose pour moi, il y a plein de touristes, intégrez moi à un groupe qui part d'une auberge". Elle appelle un type. Le type me propose une excursion au Djoudj (parc naturel avec pleiiiiiin d'oiseaux). 25000 francs. Bin non, et puis je veux aller à l'autre parc moi, à la langue de Barbarie. "Ah mais viens avec moi, je connais un guide qui y va demain".
Je lui suis, j'ai confiance.

Et là je tombe sur Babakar. LE guide certifié, rigolo, cultivé. Il est dans sa voiture dans la rue. Il ma propose son excursion à 25000. Il part avec un couple de Français.
Une fois que j'ai descendu mon prix à 15000, on fixe un rdv.
Mais je ne suis pas pressée, alors je reste papoter avec lui une heure. Il me parle des enfants de la rue. Leurs parents, trop pauvres, les ont envoyés chez un marabout, dans une école coranique. Alors ils apprennent à réciter le Coran sans le comprendre (évidemment, ils ne parlent pas arabe); et pendant la journée, ils vont dans la rue mendier. Des sous, à manger, quelque chose.
A midi, ils rapportent tout et partagent pour le déjeuner. Ceux qui n'ont rien sont frappés.
On les voit parfois, ceux qui n'ont rien, ils dorment dans la rue. Ils préfèrent ça à la cravache.


Je rentre à l'auberge, j'y rencontre un groupe de jeunes baroudeurs Français. Ils ont mon âge. Ils font le tour de l'Afrique en 3 ou 4 mois en vélo.
C'est drôle ces rencontres.

Le lendemain, donc.
J'arrive au rdv. Babakar n'est pas là. Je me demande encore une fois dans quoi je me suis embarquée. Mais je suis méfiante pour rien. Il arrive 20mn plus tard.
On part, avec le couple de Français, dans sa voiture.
Et au beau milieu du désert, on tombe sur une école. Paumée.

Là je comprends pourquoi pour ces gens, il est difficile de faire avaler la pilule de l'école obligatoire. Après tour, ils vivent dans des maisons en paille. Ils ont juste besoin d'avoir 3 poissons pour nourrir la smala. Alors Napoléon et Victor Hugo, finalement, à quoi ça va leur servir ?

Il y a une salle de classe. Et deux annexes en paille. Au milieu du sable et des buissons. La carte du Sénégal est dessinée à la main. Ils sont presque pieds nus, ils ont un vieux cahier et un crayon.

Et moi j'ai un appareil photo SONY 8 millions de pixels.
Et je les prends en photo, comme si j'étais au zoo.
Et je les affiche sur un blog.

Autre culture...


lundi 2 mars 2009

La première épopée



Après une journée calme (dimanche 15 février) dans la grande maison jaune et orange, je me décide à partir au large, sac sur le dos, guide à la main.
Le grand inconnu.

Lundi, 5h45, mon réveil sonne. Discrètement je m'habille, j'avale un bol de céréales, j'ouvre silencieusement la porte de la grande maison jaune et orange. Il fait nuit, un peu frais. A moi l'aventure.

La veille, on avait cherché sur Internet comment se rendre à St Louis (histoire de savoir quand même où aller...). Je prends un taxi jusqu'à la "gare des pompiers".
Et je me retrouve à la "gare routière". Je mets des guillemets parce qu'en fait, c'est un énoooorme terrain vague avec plein de voitures dedans. On aurait dit une décharge de voitures. Sauf que les ordures en question, il faut bien que je m'y résigne, ça va être mon moyen de transport. Un type vient me voir "tu vas à St Louis ?" "euh, oui" "viens par là". Vlan, me voilà 5° membre d'un taxi 7 places. On attend qu'il finisse de se remplir avant de partir. Et en attendant, je papote, à 6h20, avec les gens. 2 gars me demandent en mariage, un 3° me glisse son numéro.
No comment.

Je suis assise sur la banquette de toute derrière, au milieu, les genoux repliés sur ladite banquette car il n'y pas d'autre place.

4h plus tard, j'ai très mal aux fesses. Mais je suis à St Louis, au Nord du Sénégal.
En fait non, je ne suis pas encore à St Louis, je suis sur le continent. St Louis est une île juste en face. Enfin, me dégourdir les pâtes...

Je descends du taxi, avec ma tronche de blanche très blanche, mes habits occidentaux que je troquerais volontiers contre un boubou, et mon sac à dos rouge. Je suis assaillie "taxi jusqu'à St Louis ?" "NOOOOOON, je vais MARCHER" "mais c'est loin, viens dans mon taxi" "non, je veux marcher, jmen fous, j'ai les fesses en compote".

Haha.


En fait, j'ai marché 45mn. Je croyais que l'île, c'était tout près.
Pendant ma longue marche, je traverse un village extrêmement pauvre. Sur le sable qui borde la bitume, des femmes, vieilles, vendent des fruits et légumes anorexiques recouverts de mouches. Les enfants se baladent pieds nus, la morve au nez. Ca pue.

Et là, grand sentiment de vide.
Que fous-je ici ?
Mais qu'est ce que je suis venue faire ???
Il y avait pourtant, pour bien moins cher, des séjours à Malte tout compris, hôtel 3*, vol, demi pension. J'aurais dû y aller, j'aurais dû, j'aurais dû.
Les larmes montent presque. J'avance sans savoir où je vais, sans savoir où je vais dormir. Tout est moche. Mais... mais merde.



Et puis tout à coup, une petite fille, 3 ou 4 ans, le visage tout crado, me regarde et me dit, avec un énorme sourire "bonjour".

Je réponds avec un sourire encore plus grand.
...
Je suis touchée.

Et là, une larmichette coule. En fait, je sais pourquoi je suis venue au Sénégal et pas à Malte. Parce que l'hôtel 3*, ce n'est pas moi. Malte, les plages, la mer transparente, ce n'est pas moi. Les touristes arrogants avec des lunettes de soleil plus grosses que leur visage et des sacs à mains dernier cri, ce n'est pas moi.
Moi c'est plutôt le brouillon, l'aventure. L'inconnu. Et les sourires des enfants qui n'ont rien d'autre à offrir que leur salutation.

Voilà pourquoi je suis là, au Sénégal.