lundi 29 décembre 2008

Ponge

Restons dans la poésie du XX° - puisqu'il n'y en a pas de plus belle, et souvenons-nous de nos cours sur les poèmes en prose. Le Parti Pris des Choses, les objets du quotidien transfigurés.
Je ne pouvais pas partager autre chose que le célébrissime Pain de Ponge.

La surface du pain est merveilleuse d'abord à cause de cette impression quasi panoramique qu'elle donne : comme si l'on avait à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la Cordillère des Andes. Ainsi donc une masse amorphe en train d'éructer fut glissée pour nous dans le four stellaire, où durcissant elle s'est façonnée en vallées, crêtes, ondulations, crevasses… Et tous ces plans dès lors si nettement articulés, ces dalles minces où la lumière avec application couche ses feux, - sans un regard pour la mollesse ignoble sous-jacente. Ce lâche et froid sous-sol que l'on nomme la mie a son tissu pareil à celui des éponges : feuilles ou fleurs y sont comme des sœurs siamoises soudées par tous les coudes à la fois. Lorsque le pain rassit ces fleurs fanent et se rétrécissent : elles se détachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable… Mais brisons-la : car le pain doit être dans notre bouche moins objet de respect que de consommation.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ah en effet, tu ne pouvais éviter ce texte qui semble écrit pour toi !! Mais comment ça la poésie du XX° est la plus belle ??

MC a dit…

I knew it I knew it
je savais que ça te ferait frémir :)

oui, je soutiens, la poésie du XX° est la plus belle. Supervielle à mes côtés le soutient. Et Saint John Perse, quand on le comprend, aussi.
Et toc.